Qu'il va m'être difficile de réussir à donner mon opinion sur "Les petits mouchoirs" vu hier soir. Avec l'énorme battage autour du film, il est ardu de garder ma spontanéité.

Lectrice de "Première" et de "Télérama", j'ai entrevu les montagnes russes des réactions qu'il suscite avant même  sa sortie. Sans surprise, je me situe à mi-chemin entre les deux avis évoqués ci-dessus. En gros, si je trouve le côté bande de potes bien filmé, d'autres qualités ont émergé à mes yeux. Lors de deux scènes, qui sont celles qui marquent la destinée du personnage joué par Jean Dujardin, le spectateur est abasourdi, absorbé par ce qui se passe ou se dit à l'écran. Sur ce point, et l'exercice me paraît difficile, je trouve le film réussi.

Une ou deux scènes de personnages présents au long du film m'ont touchée et semblé justes, mais pour bien d'autres, le charme n'a pas agi sur moi. Par exemple, on sent que Guillaume Canet a eu envie d'écrire un  film de personnages, plus que d'action. Ca tombe bien, pour ma part, ce sont toujours les personnages qui m'intéressent, dans une histoire. Malheureusement, s'il a pris du temps pour les développer, il a omis un paramètre essentiel : les êtres humains, même riches et beaux, sont complexes.

Ici, la complexité n'a pas sa place : les femmes, hormis Marie (Marion Cotillard) n'existent que parce qu'elles sont la meuf de quelqu'un. Pas question pour elles d'avoir des personnalités  autonomes. Si d'aventure,  le scénar a 5 min à donner à Isa ( Pascale Arbillot) c'est pour évoquer sa (non) relation avec son mec.

Les mecs sont un peu mieux servis mais de peu:  chacun a un trait de caractère : Lafitte est égocentrique, Cluzet est colérique, Magimel est gay (ah bon, c'est pas un  trait de caractère ? Ah bah alors il est rien).

Marie, elle,  est par-faite. Cotillarisée, son perso est sensible et émotif. Elle est féminine mais joue au foot, drôle mais à l'écoute, bref chiante à mourir. Heureusement, elle a une scène d'imperfection qui la rend un peu plus sympathique. Gilles Lellouche, lui, réussit à se dépatouiller dans son personnage et lui donne une consistance bienvenue.

Enfin, et c'est surtout ça qui pourrit un film qui garde par ailleurs les qualités évoquées plus haut ( car je pressens les mails d'insultes suite à mon avis peu enthousiaste), environ 20 % des dialogues sont mauvais. Mais mauvais, hein. Un peu comme si Vanessa Paradis et une stagiaire de  TF1 avaient planché dessus.

"Tu es une belle personne", "Même si on s'est fait beaucoup beaucoup de mal, je suis fière d'avoir été ton amoureuse", "Et ton coeur ? Tu t'achèteras pas un 3e ventricule, c'est le même que nous", "Tu m'as tellement donné"...gna gna gna gna gna. Ne manque que "c'est que du bonheur" et la  panoplie "bons sentiments de chez Etienne Mougeotte" est complète.

C'est vraiment regrettable, car malgré ses ratages, "Les petits mouchoirs" semble un film vraiment sincère ( quoique je devrais dire "fait avec le coeur" pour être raccord). L'idée de développer des personnages est idéale pour un film choral, mais ils ne le sont ici que de façon monolithique et au détriment de la tension dramatique. A mes yeux, Canet aurait pu rajouter 2h ou 3H à son histoire et la développer en série. Certains traits esquissés y auraient gagné en développement et l'ensemble, en intérêt.